Alimentation haute tension pour CGM
Appareil : Module d'alimentation haute tension / très basse consommation pour compteur Geiger Muller
Date : 2017-2020
Type : PG-HT1
Auteur : Patrick Guivy
Principale caractéristique : consommation moyenne de l'ordre de 33µA / Average power consumption arround 33µA.
Préambule
Ce montage n'est pas de moi (j'en serai bien incapable !). Il a été réalisé par M. Patrick Guivy. Je ne fais que l'héberger sur mon site. L'explication ci-après est également de son cru.
A noter qu'en 2019, une nouvelle version d'alimentation a été conçue par M. Patrick Guivy. Elle reprend une partie des principes de celles qui est exposée ici mais ne consomme plus qu'environ 3µA (10 fois moins que la présente alimentation). Le schéma n'est pas public.
Introduction
Il y a des conversations qui naissent au milieu d’une table blanche un premier de janvier et qui se terminent un 31 de décembre, sur un coin de table. Ces feuilles blanches qui se remplissent sont les avatars de l’imagination, elles ponctuent le temps et l’espace entre les nappes blanches ainsi reliées.
Il m’avait dit : pourrait-on faire une alimentation 400V à partir de 3.6V ? Oui, avais-je dit.
Qui consommerait moins de 50µA, alors ! Bien sûr que non ! Avais-je répondu, lapidaire.
On ne sait du futur que son passé et on apprend du présent qu’il n’est que mouvement. Les non du passé sont souvent des oui en devenir. Parfois l’inverse aussi, ce sont ces renoncements qu’il faut fuir pour garder l’envie.
Le schéma qui est proposé ici n’a aucune prétention de vérité, il est juste le fruit d’une petite expérience qui mélange les oui et les non en un possible plaisir à concevoir « un truc qui maaaarche ». Ainsi le disait un de mes anciens chefs, P’tit Louis, un très bon mécanicien à l’esprit ouvert, alors que nous officiions dans une petite usine d’une petite province Normande, chez un Très Grand de l’électronique, illustre, et aujourd’hui réduit à l’état de ses propres étoiles devenues presque sombres. Nous prenions chaque jour du plaisir à travailler et remplir de schémas des feuilles de papier grandes comme d’autres nappes blanches. Ce temps au sein de cette famille à construit mes certitudes techniques.
Tempus fugit.
Avec le propriétaire des lieux, Pascal, nous attirons l’attention de l’amateur de la chose électronique que le Diable se cachant dans les détails, ce schéma lui offre de multiples cachettes. J’ai essayé de le concevoir en utilisant un minimum de composants, simples à trouver, peu onéreux, de manière à donner à chacun la possibilité de créer par lui même son alimentation HT pour un compteur Geiger sans recourir à la solution de facilité qui consiste à l’acheter toute faite.
On pourra aussi en dévier l’usage pour créer tout autre type de tension, notamment pour un détecteur à diode PIN. Toutefois chacun se souviendra qu’il faut manipuler avec précaution les tensions de cette catégorie, en respectant les règles de sécurité d’usage. Cette manip demande un peu de pratique quand même et de prudence.
Chaque composant a été choisi avec beaucoup de soin et le résultat final dépend essentiellement des composants mis en œuvre. A ce titre vous pouvez jeter tous vos vieux clous cachés dans les tiroirs, les composants essentiels utilisés ici sont issus des technos très récentes (2017) et très performantes utilisées dans ces saletés de tablettes, les éclairages LED et les alim pour PC.
Schéma de l'alimentation (cliquer pour agrandir)
Comment ça marche ?
Comment ça marche ? Mais c’est très simple, les alimentations HT….
Le convertisseur Boost
Commençons par le cœur de l’alimentation, le convertisseur : boost, low side switch. Le fonctionnement est classique : pendant le temps de fermeture de Q5, le circuit magnétique L1 se charge en courant quasiment linéairement avec le temps (si on néglige la résistance série de L1, faible, pour une question de rendement).
A l’ouverture de Q5, l’énergie accumulée dans L1, qui vaut ½ L1 I², n’a d’autre solution que de s’échapper via D4 et s’accumuler dans C13 où l’énergie sera ½ C13 V². Ce type montage est capable de générer n’importe quelle tension différente de la tension d’alimentation (Boost) dans la limite de la tenue des composants, pas à pas, chaque grain d’énergie formé dans L1 se trouvant accumulé dans C13.
Choix des composants
Pour obtenir de bonnes performances, il faut choisir les composants avec soin. Le transistor est un Coolmos d’Infinéon, IPD60R3K3C3, sans doute le meilleur du marché actuellement, recommandé par mon vieux complice de Flers, Albert. Il est utilisé dans beaucoup de systèmes d’éclairage et d’alimentations à très haute performance et très forte compacité. C’est un mos qui possède intrinsèquement des pertes de commutation extrêmement basses et des capacités de fiabilité excellentes. Vous pourrez vous amuser à le remplacer par d’autres modèles mais vous serez déçus. L’essayer, c’est l’adopter.
La diode D4 pose également des problèmes en terme de pertes de commutation et de courant de fuite. Plusieurs essais m’ont fait choisir une petite diode bon marché et très performante : STT2R06. La capacité C13 doit être choisie en polyester de classe 1000V. Souvenez vous qu’en cas de dysfonctionnement de la régulation la tension peut monter dans C13... à l’infini, limité par la tenue du Coolmos, c’est à dire largement au delà de 800 V.
Le choix de L1 est aussi important, trop faible il conduit à des courants de crête trop forts, trop grande, à des pertes cuivre et fer trop importantes. 6.8mH dans une série 19R de Murata est un bon compromis.
Commande du Mos
Revenons à la commande (low side driver) du mos de puissance. Tout le secret du fonctionnement d’un mos réside dans sa commande : elle doit être franche et capable de charger la très importante capacité de la gate. Seul un driver approprié peut permettre d’atteindre les performances optimales d’un mos. C’est la fonction d’U4, un TPS 2828, surprenant petit driver dont le courant de repos a le mérite d’être très proche de zéro. Ce n’est pas ce type de driver qu’on utilise habituellement avec l’IDP60R3. Il est parfaitement capable de driver la gate avec plusieurs ampères dans des temps de montée de l’ordre du volt par ns et ceci pour une conso de repos très proche de zéro. Les capacités de découplage sont à intégrer avec soin (C1 à C4) et les bandes de masse doivent être épaisses et bien disposées.
Comme je le disais, attention au Griffu, il a visiblement de toutes petites griffes et il vous en faudra pour souder ce composant (sur un adaptateur Ariès SOT23/DIL6, pour ceux qui se lanceront dans un montage sur plaque à trous au pas de 2.54). De bons yeux aussi !
Vous remarquerez que le driver n’est pas alimenté à partir du 3.0V mais au travers du groupe C7, D1, D2, C8 formant un doubleur de tension à partir du 0/3.0V des créneaux délivrés par la base de temps autour de U1. Il s’agit juste de disposer d’une tension de commande appropriée du driver pour Q5. Le choix de D1 et D2 est évidemment orienté vers des diodes Schottky (BAT43).
Le translateur de tension
Le groupe Q1, Q2, Q3, Q4 et les composants associés forment un translateur de tension pour passer d’un signal 0/3.0V issu de U1 à celui délivré par le doubleur et nécessaire au bon fonctionnement de Q5. Il m’a été impossible de trouver une fonction intégrée de ce translateur qui soit sobre et qui réponde au besoin de ce montage spécifique. Le schéma est un peu bizarre, hybride, utilisant du bipolaire et du fet car je n’ai pu trouver des fet adaptés en canal P. Cette zone est perfectible car elle consomme pas loin de 7µA, un gouffre, quoi ! Q3 et Q4 sont les charges dynamiques pour Q1 et Q2, de manière à garantir des temps de montée courts (1V/ns typ) et des impédances faibles sans avoir recours à des résistances de charge forcément trop gourmandes.
L’essentiel du courant est consommé par la commande des bases de Q3/Q3. Avec des fet, ce serait parfait. Les deux branches de ce pont sont commandées en opposition de phase par U1C et U1D et on peut envisager de se servir du même montage pour un convertisseur à deux demi ponts de puissance (avec des signaux symétriques à rapport cyclique ½, ce qui n’est pas le cas ici).
La base de temps est formée autour de U1A et U1B. On aurait pu penser utiliser un 555, mais il aurait fallu un demi Niagara de µA pour l’alimenter. R1, R3 et C5 participent à la sobriété de la base de temps qui fonctionne sous 3V pour en limiter sa consommation. Bien sûr le choix de la fréquence est très important, déterminée par R1,R3,C5, ni trop basse pour permettre une charge rapide de C13, ni trop forte pour éviter les pertes capacitives de commutation des portes.(# 800Hz).
Le temps de fermeture de Q5 (#220µsec) est déterminé par le monostable formé par U3A, R4,C6. On aurait pu choisir de réaliser cette fonction avec un 121, mais là encore le Diable guettait et les excès de consommation auraient été certains. Remarquez également que ce montage est un doubleur de fréquence : le monostable se déclenche à la fois sur front montant et descendant.
La régulation basse tension
Un mot, juste, sur le régulateur de tension, nécessaire à la stabilité du fonctionnement de la base de temps et de la commande de fermeture de Q5. C’est à mon sens un excellent circuit (TPS78330DDCT), très sobre avec 500nA de courant de repos. Bien sûr, il est « insoudiable » ! Il fonctionne entre 3.4 et 4.5V d’alimentation et dégage au dessus de 5V, attention.
La régulation haute tension
Et la régulation, dans tout cela ? C’est un point capital. J’ai fait le choix de prendre la mesure sur le signal de sortie pour l’asservir au mieux. Un rapide calcul montre que l’essentiel de la consommation du montage est dû à... la prise de mesure. R12 est à manipuler avec soin, elle fait 5Go, elle vaut pourtant moins de 4€, je conseille un modèle à couche métallique. Q7 fonctionne dans un régime linéaire et le gain en signaux forts est sans rapport avec celui qui est disponible ici avec ce type de courant de base (prendre un type C). On retiendra que U3B fonctionne en comparateur dans un régime quasi linéaire autour de son point de basculement. Il est illusoire de mesurer au scope quoi que ce soit dans cette zone compte tenu des impédances en jeu et que la moindre tentative peut se solder par une montée au plafond de la tension de sortie. Si toutefois on veut, et on le doit, mesurer la tension de sortie, un bon multimètre 20000 pts sur le calibre 200µA avec une 1Go en série permettra d’y voir clair (avec une notoire augmentation de la conso générale du montage).
Le fonctionnement global de la régulation, qui n’en est pas une au sens habituel du terme, conduit à activer ou inhiber la commande de Q5 selon qu’on est en dessous de la consigne de tension ou pas. C’est une régulation « lente », en TOR, qui n’intègre pas les pôles du modèle de la fonction de transfert, qui ne fait pas appel à des réseaux actifs de compensation pour garder une marge de phase suffisante autour du gain de référence. Il aurait alors fallu utiliser des Aop et faire des calculs fastidieux pour cet asservissement plus ou moins échantillonné, forcément consommateur de courant. On trouve toutefois de très bons Aop avec des courants de repos très faibles (500 nA) mais avec des bandes passantes très faibles. Quelques capacités C14 et C11 sont présentes pour étouffer un peu la réponse de l’asservissement. L’ondulation est faible et très largement inférieure à 0.1% de la tension de sortie. Il est quasiment impossible de mesurer la réponse en tension à un échelon de courant de sorte que le calcul des pôles de la fonction de transfert ne peut être que théorique et donc gourmande en temps de mise au point.
Globalement, ce montage consomme #33µA sous 3.6V et charge nulle. Il consommera guère plus une fois connecté sur un tube de type SBM20 dont la charge par coup est de l’ordre de 1.5 10-10 Cb, à radioactivité ambiante de l’ordre de 20 cps/min. (conso calculée du tube de l’ordre de 0.75mA à fréquence maxi de détection soit # 5k cps). En régime normal, la régulation relaxe et envoie des salves de une à 3 impulsions sur Q5 toutes les 100 à 400ms pour maintenir la tension de sortie à 400V.
En attendant la suite
Nous souhaitons à chacun de pouvoir s’amuser autour de ce montage sérieux, y prendre du plaisir et de la satisfaction. Chacun pourra tenter de gagner ici ou là quelques µA, c’est tout à fait possible.
Merci à Pascal qui a mis le plan au propre et m’a fait part avant hier d’une idée à laquelle j’ai encore répondu non. Un oui en devenir, donc : une seconde version avec une refonte de la prise de tension pour la régulation en espérant gagner un facteur 10 sur la consommation totale peut être aussi avec une compensation en température dont je ne sais si elle est utile.
Certains esprits, forcément diaboliques, verraient même bien une V3 µcontrôlée. C’est cela, oui. Pffft. NON.
Patrick Guivy, 31 décembre 2017