JAZ JAZISTOR DATOR GENDIC

Décembre 2024

Cette page concerne la révision et la réparation d'un réveil Jaz Jazistor Dator Gendic, acheté en panne sur Leboncoin.

INTRODUCTION

Jaz fait partie des marques mythiques françaises dans le domaine des pendules et réveils. On trouve sur le net plusieurs sites très bien faits consacrés à la marque (essayez "musée Jaz").

À la fin des années 1960, Jaz a lancé une série de réveils et pendules avec un mouvement électronique. On m'en a offert un (vers 1970), un Dator-Gendic (le modèle présenté sur cette page) qui avait comme particularité, en plus d'indiquer l'heure et d'avoir une sonnerie, d'indiquer la date et le jour, une première mondiale d'après les publicités de l'époque.

Je n'aimais pas trop la forme un peu kitch de ce réveil, censée rappeler une télévision avec ses enceintes latérales. Puis le temps a passé, ce réveil a disparu, et en 2024 (nostalgie, quand tu nous tiens), j'ai décidé d'en racheter un, forcément d'occasion.

Le vendeur m'avait indiqué qu'il démarrait mais s'arrêtait presque aussitôt. C'était plutôt bon signe. Pour le reste, son état extérieur était très correct pour un appareil de plus de 50 ans.

Lors du démontage, j'ai constaté que le réveil avait déjà été ouvert. Il avait dû rester pas mal de temps les tripes à l'air car il y avait beaucoup de poussière dans le mécanisme, ce qui n'aurait pas pu se produire s'il était resté dans sa boite.

Plus ennuyeux, une pièce mécanique était détachée et, je m'en suis aperçu plus tard, une autre pièce était manquante. Ces deux pièces étaient en lien avec le dateur.

Par contre, la partie horloge (calibre 6AR) était certes sale mais semblait prête à vouloir repartir. Et de fait, après nettoyage et réparation de l'électronique, il est reparti.

J'ai donc retrouvé le réveil de ma jeunesse, fonctionnel et toujours aussi kitch. Mais aujourd'hui, en 2024, ça me dérange beaucoup moins...

ASPECTS TECHNIQUES

La bonne nouvelle est que l'on trouve la documentation technique des différents calibres électroniques de Jaz (dont le 6AR). Pour ma part, je l'ai trouvé sur le site de Retrotechnique.org et j'en mets une [archive ici] au cas où elle disparaitrait.

La conception du réveil est intéressante car elle se trouve à mi-chemin entre les réveils mécaniques traditionnels avec leurs pièces en métal et les mécanismes tout en matière plastique qui ont suivi. La qualité des matériaux est dans l'ensemble assez élevée (beaucoup de laiton et de métal) mais elle cohabite avec pas mal de pièces en plastique ou en nylon, sans compter le boitier.

En résumé, on a un réveil fait en grande partie "à l'ancienne", mais dont la force motrice a été confiée à l'électronique. Je signale tout de suite une particularité intéressante de ce mouvement qui est son échappement que je trouve plutôt astucieux et qui est très silencieux. Terminé les "tic-tac".

Concernant l'électronique, c'est assez épique par rapport à ce que l'on connait dans les années 2020. Il y a un transistor (monté "en l'air"), 2 condensateurs, 1 résistance et 2 bobines qui servent à actionner la roue de balancier équipée d'aimants (une impulsion qui repousse les aimants et fait tourner le balancier) et à détecter le moment où il faut le relancer (une bobine détecte le passage de la roue de balancier au point mort pour le relancer). La conception du mouvement reste donc pour l'essentiel mécanique (un balancier, un échappement) l'électronique ne faisant que redonner de l'énergie au balancier. La précision du réveil n'est donc pas liée à "électronique" (pas de quartz et tout ce genre de choses) mais est mécanique.

On notera que ce principe ne permet pas en théorie un démarrage automatique lorsque le balancier est à l'arrêt. Mais Jaz a ajouté une résistance (150kohms) qui donne un certain courant au transistor (environ 10µA) qui permet de générer un champ (très faible) dans la bobine qui fera démarrer le balancier qui oscillera très faiblement au départ mais suffisamment et de plus en plus jusqu'à ce qu'il fonctionne en régime permanent.

L'alimentation électrique est assurée par une pile de 1,5V classique. Le fabricant déconseille l'utilisation de piles alcalines. C'est encore souvent le cas en 2020 pour certains mouvement électromécaniques (je ne sais pas vraiment pourquoi (résistance interne plus faible ?).

La consommation totale du mouvement en régime permanent (hors sonnerie) est de l'ordre de 140µA mesuré (conforme à ce qu'indique la documentation) ce qui autorisait dans les années 1970 un fonctionnement d'environ 400 jours avec une pile LR14 saline (probablement plus en 2020).

Je ne détaille pas plus le mouvement, tout est très bien expliqué dans la documentation technique déjà mentionnée.

RÉPARATIONS

Démontage

• Retirez la pile de son logement.
• Faite passer une lame souple (comme ce que l'on utilise pour ouvrir les boitiers de smartphone) sous le décor métallique supérieur du boitier afin de le soulever légèrement. Ne forcez pas.
• Avec une pièce plastique fine (comme ce que l'on utilise pour ouvrir les boitiers de smartphone), faite levier entre la partie arrière du décor métallique et le boitier.
• Une fois ce décor retiré, les décors dorés situés sur le côté et le cache transparent du cadran vont tomber naturellement.
• Dévissez les 4 pieds en laiton qui sont sous le boitier. Le décor inférieur sera ainsi libéré et le mécanisme pourra être sorti par l'avant du boitier.

Ci-après, des photos des outils utilisés.

Variante que je n'ai pas testée :

• Retirez la pile de son logement.
• Dévissez les 4 pieds en laiton qui sont sous le boitier. Le décor inférieur sera ainsi libéré.
• Retirez le cache transparent du cadran qui n'est plus tenu que par le décor de la partie supérieure.
• Ceci-fait, le décore de la partie supérieure s'en va, ainsi que les autres parties du décor et le mécanisme pourra être sorti par l'avant du boitier.

Ci-après, des photos du mécanisme sorti non nettoyé.

Nettoyage du boitier et des décors

Le boitier en plastique se nettoie avec n'importe quel produit doux (savon noir, liquide vaisselle) non abrasif.

Les décors métalliques sont plus problématiques.

• Les pieds : utilisez du Mirror.
• Le décor supérieur : il était piqué et les photos sur le net montrent que c'est souvent le cas. Ce décor semble être en laiton, du moins en surface, et est verni. Donc un nettoyage au Mirror n'améliorera pas la situation.
  Vous pouvez ôter le vernis avec de la paille de fer 000 ce qui mettra le métal à nu et vous pourrez terminer au Mirror. Cela améliorera l'aspect mais ne fera pas disparaitre complètement les défauts. De plus, exposé à l'air, le métal se ternira et devra être régulièrement nettoyé, sauf si vous le vernissez.
  Vous pouvez tenter de peindre mais le résultat risque d'être décevant.
  Vous pouvez tenter de recouvrir le décor avec une feuille de cuivre doré (il en existe de 0,03mm d'épaisseur) ou de métal doré.
  Vous pouvez ne rien faire et vous dire que c'est la marque du temps qui passe...

Réparation de l'électronique

Pour la réparation de l'électronique, je trouve préférable de retirer le mouvement mais ce n'est pas obligatoire. Le mouvement est tenu par trois vis. Une patte (2) qui fait ressort doit être abaissée pour libérer la patte (3).

Dans le cas présent, et probablement dans tous les cas pour une horloge de cet âge, le condensateur chimique était mort. Il s'agit d'un 25µF 10V ou 6,3V selon les modèles (sur tous les deux modèles dont je dispose, ce condensateur était à changer).

Pour remplacer ce condensateur, il faut retirer la plaque de bakélite sur laquelle se trouve l'électronique en la tirant vers l'arrière du mouvement. Sauf que ce n'est pas si simple...

• Tout d'abord, faites très attention à ne pas abimer ou décoller les bobines et ses fils. Sinon, poubelle !
• Retirer les écrous (1) qui bloquent cette plaque.
• Si vous faite la manipulation mouvement non démonté, abaissez la patte de contact (2) pour dégager la patte (3).
• Faites tourner la roue de balancier (4) comportant les aimants dans le sens des aiguilles d'une montre afin que l'aimant le plus épais se trouve à l'arrière.
• Relevez l'ensemble du circuit imprimé afin que le frein électromagnétique (5) puisse passer au dessus du bâti (6) tout en tirant ce circuit vers vous. Faites très attention de ne pas forcer sur la roue de balancier (4) et assurez vous de ne pas faire de pression sur la bobine (7).

Pour le remplacement du condensateur chimique, je vous conseille de couper les pattes à ras bord du condensateur. N'essayez surtout pas de le dessouder, vous risquez d'abimer les fils très fragiles de la bobine.

Ressoudez ensuite le nouveau condensateur sur les pattes de l'ancien, en respectant la polarité et en évitant de chauffer trop longtemps.

Pour le 22µF (on ne trouve plus de 25µF), vous pouvez prendre n'importe quel condensateur chimique neuf de tension de service 5V ou plus, sous réserve qu'il ne soit pas plus gros que l'ancien (si vous prenez un 6,3V, il sera beaucoup plus petit !).

Certaines platines électroniques étaient équipées de condensateurs chimiques au tantale. Avantage : plus petits que les chimiques aluminium. Inconvénient : à l'usage, sauf matériel professionnel, ils vieillissent encore plus mal que les chimiques aluminium. Donc je vous conseille de rester "dans le classique" et de prendre un condensateur chimique aluminium. Sauf, si vous trouvez un condensateur non polarisé et non chimique de 22µF : ça sera encore plus fiable.

Ceci fait, remettez le tout dans le mécanisme en suivant la procédure de retrait mais à l'inverse.

Nettoyage et entretien de la mécanique

Il n'y a pas grand-chose à dire sur la mécanique de ce réveil qui est proche de celle des réveils mécaniques anciens, à l'échappement près et à la présence d'éléments en plastique (échappement, gestion de la date et du jour).

Comme dans tout appareil d'horlogerie, les frottements (poussière, graisse ou huile séchées, etc.) sont l'ennemi à combattre. La documentation préconise un nettoyage à l'essence F ou C ou à l'alcool, ce que j'ai fait. J'ai ensuite huilé les axes et graissé certaines parties à la graisse silicone, tout cela après évidemment un dépoussiérage avec un pinceau.

Modification manuelle de la date

Généralités sur le mécanisme

Le disque de la date et sa roue dentée qui permet de le faire tourner sont pris en sandwich entre le disque des jours et sa propre roue dentée qui permet de le faire tourner. Chaque disque peut tourner indépendamment.

Toutes les 24 heures, l'horloge fait avancer ces deux disques d'un cran (pièce (6)) ce qui change à la fois la date et le jour (voir photo plus loin).

Un bouton situé à l'arrière de l'horloge permet de faire avancer la date sans faire avancer le jour. Une pièce agit sur le disque de la date pour le faire avancer d'un cran tout en positionnant une autre pièce qui bloque les jours.

Un levier (4) appuit sur les deux disques afin qu'ils ne puissent tourner naturellement et la partie (5) de ce levier permet de s'assurer que les roues dentées des disques de la date et du jour sont parfaitement alignées.

Pièce pour blocage du disque des jours

Un des réveils dont je dispose avait été démonté et malheureusement, la pièce qui permet de faire avancer la date était désolidarisée de son axe et la pièce qui bloque le disque des jours lorsqu'on modifie la date manuellement avait disparu. J'ai donc refait cette dernière en impression 3D.

Cette pièce (2) se met en dessous de la pièce (1) (mettre un peu de graisse silicone et éventuellement, une rondelle de 1/10ème de millimètre pour faciliter sa rotation). Lorsque la pièce (1) est au repos, elle met au repos la pièce (2) afin qu'elle ne touche pas les dents du disque des jours.

Lorsqu'on actionne la pièce (1) pour faire avancer le disque de la date, la pièce (2) est poussée sur la roue dentée du disque des jours par le ressort (3) afin de la bloquer.

Sur ce réveil, il faut tourner les aiguilles pour régler le jour. Mais une fois que c'est fait, il n'y a aucune raison de refaire le réglage tant que le réveil fonctionne. Jaz n'a donc pas prévu une autre commande pour faire avancer les jours.

Sur un autre réveil que j'ai acquis plus tard, j'ai constaté que la pièce qui maintient le disque des jours lorsqu'on avance la date manuellement est très différente de la mienne et est beaucoup plus compliquée et moins efficace. Ceci-dit, il y a dû y avoir des modifications de conception entre les deux réveils car il y a d'autres différences et en particulier, sur le premier réveil, il n'y a pas d'axe pour maintenir la pièce de blocage du disque des jours.

Avance manuelle de la date qui tourne dans le vide

Sur le réveil de la photo précédente, j'ai eu un autre problème : après un changement manuel de date, il arrivait qu'il ne soit plus possible de changer de nouveau la date : la pièce qui fait avancer le disque de la date tournait dans le vide.

Lorsque vous changez la date, la partie (5) du levier (4) part vers l'arrière car elle est chassée par une dent de la roue dentée du disque de la date (ou du jour). Une fois la rotation d'un cran achevée, la partie (5) du levier se remet entre deux dents. En théorie, si les dents des disques du jour et de la date sont mal alignées, la forme de la partie (5) (une dent) les forcera à se réaligner. Sauf que sur ce réveil, ça ne fonctionnait pas bien.

La roue dentée de la date se trouvait parfois dans une position intermédiaire qui ne permettait pas à la pièce (1) d'être en prise. Mais lorsqu'on forçait manuellement le levier à appuyer sur les roues dentées, tout rentrait dans l'ordre.

Une première raison possible est que la lame ressort qui agit sur le levier n'exerçait pas assez de pression. Il en faut, mais pas trop quand même sinon, c'est l'horloge qui ne pourra plus faire tourner les disques date-jours. Néanmoins, une légère augmentation de la pression du ressort a permis de résoudre en partie le problème.

Mais pas complètement...

L'autre raison vient de la pièce qui bloque le disque des jours : le blocage est imparfait et le disque tourne légèrement. Ce n'est pas forcément gênant... Sauf si le disque des jours se retrouve dans une position intermédiaire avec une dent de sa roue dentée qui bloque le levier en position haute (ou du moins, l'obligerait à exercer une pression plus forte pour l'obliger à tourner).

C'est la raison pour laquelle je trouve que ma pièce en impression 3D est plus efficace ! Je n'ai pas de problème de ce genre sur la première horloge.

Bruit en fonctionnement

Sur une des horloges, en fonctionnement, j'avais comme un bruit de ressort (bzoïng, bzoïng). Bien sûr, je ne m'en suis aperçu qu'une fois le réveil complètement remonté.

Je ne sais pas pourquoi il y a ce bruit ! Le ressort tape ou frotte sur son guide d'avance-retard. J'ai mis un peu de lubrifiant, depuis, plus de bruit.

LES AUTRES PIECES

Les deux photos qui suivent montrent :

• Le boitier.
• Les pièces de décoration.
• La partie métallique qui se place au dessus du réveil et qui retient la partie transparente (qui n'est pas sur les photos).
• La partie métallique qui de place dans la partie inférieure du boitier et qui retient les pièces de décoration et la partie transparente (qui n'est pas sur les photos).
• Le boitier (intérieur et extérieur).
• Le cache pour la pile.
• Le cadran.
• Le dateur (jours et dates).

Les autres petites pièces sont :

• Les pieds de la face avant (longs). Ils se vissent sur l'ossature du réveil.
• Les pieds de la face arrière (courts) qui se vissent sur les écrous carrés qui s'insèrent dans le boitier.
• Les aiguilles.
• Les boutons moletés, en laiton pour la mise à l'heure et le réglage de l'heure de réveil et en plastique pour le réglage de la date.
• La rondelle en métal blanche qui se met entre le dateur et l'arrière du cadran et la rondelle en laiton qui se met entre l'aiguille du réveil et l'aiguille des heures. Mettre un poil de graisse aux silicones sur les rondelles.

REMARQUE SUR LE BOUTON DE L'AVANCE DE LA DATE

Il faut absolument éviter de tirer ce bouton vers l'arrière car on risque de désolidariser la pièce qui fait avancer la date de son axe (enfoncé à force. Dans mon cas, j'ai ajouté un point de colle).

Evidemment, si on doit démonter le réveil, on n'a pas trop le choix...

Note : je n'y ai pas pensé sur le coup mais on doit pouvoir mettre une rondelle entre l'axe et le boitier pour empêcher qu'il soit entrainé lorsqu'on retire le bouton.

REMARQUE SUR L'AIGUILLE DE REVEIL

Sur le second réveil dont je dispose (qui n'est pas en photo sur cette page), l'aiguille qui marque l'heure de réveil est plus longue que sur le premier qui a servi pour l'élaboration de cette page. Une explication possible :

L'aiguille la plus longue passe au dessus des points fluorescents de 6H00 et 12H00 qui sont en surépaisseur. Deux inconvénients :

• Le point fluorescent est en partie caché si l'aiguille est réglée sur 6H00 et 12H00.
• L'aiguille doit être positionnée plus haut pour ne pas frotter contre ce point, ce qui complique un peu son positionnement pour ne pa gêner l'aiguille des heures.

Comme pour d'autres détails (mécanisme de modification manuel de la date), je suppose qu'il y a eu des améliorations au cours du temps. Le premier réveil est probablement plus récent que le second.

RÉGLAGE

J'ai vérifié le réglage du mouvement à l'oscilloscope (mesure des impulsions sur la bobine). Pour mémoire, il bat 18000 coups par heure.

Sur les deux réveils dont je dispose, il y avait une légère différence de durée entre le Tic et le Tac (environ, +/-12ms autour de 200ms), la somme des deux faisant environ 400ms. Pourtant, un des réveils présentait une avance de 2 ou 3 minutes par jours et l'autre non.

La mesure à l'oscilloscope n'est pas suffisamment précise pour faire un réglage correct et j'envisage de faire une sonde adaptée à ce type de réveil pour le brancher sur mon chronocomparateur PC-RM4. En attendant, je m'en suis sorti avec un réglage manuel de l'avance-retard.

décembre 2024/janvier 2025